Gymnastique d’écriture 3

Gymnastique d’écriture 3 : Objets vivants

Rémanence des mots propose une gymnastique d’écriture quotidienne pendant toute la durée du confinement, histoire de laisser à l’imaginaire toute latitude de respirer ! Créations ludiques, légèreté et poésie sont au RDV. NLP, Thaïs Andreani-Pertica et Colette Couderc ont répondu à l’appel de la création littéraire. Leur fantaisie et leur sens de l’humour ne vous auront pas échappé. Tous les trois sont partis de la proposition : « Observez un objet banal et décrivez-le. Détournez son usage habituel et racontez. »

Gymnastique d’écriture 3 / Télés

DEVINETTE

L’objet que j’ai choisi est de forme cylindrique. L’avant et l’arrière sont arrondis. Entièrement noir à l’exception d’une décoration tribale, il m’évoque vaguement un sous-marin. D’une longueur de deux index (courts) son diamètre fait moins d’1 cm.

Bien équilibré dans la main, j’en ai fait une fléchette qui me permet de lancer des traits d’humour autour de moi.

Ceux-ci n’arrivent malheureusement pas tous à destination ni dans un bon état. Mais n’est ce pas le cas de tout message ?

–––– Signé : NLP


ADOPTION

Il était là, trônant sur le buffet. Il avait traversé les ères, il avait convaincu les femmes et les hommes de cette maison. Il avait vaincu la poussière, on lui avait passé le chiffon, dessus, dessous, dans tous les coins de son horizon. I

l avait pour seul avantage celui d’être léger et très peu encombrant. Revêtait-il un parfum de beauté ? Faisait-il bel usage de la volupté ? Que nenni, il était laid de son état, inutile par-dessus tout. Peut-être est-ce pour cela qu’on l’aimait ? Représentait-il symboliquement la vacuité de l’être humain, travesti en objet, qui n’aurait jamais eu d’autre fonction que celle d’exister…

Il n’avait pas de nom, il n’avait aucun droit et pourtant trônait là, sur le buffet verni. Est-ce qu’on le méprisait ? Est-ce qu’on le dédaignait ? Peut-être, mais avant tout on le prenait pour ce qu’il était. 

Il y eut le déménagement.

On l’emporta. Dans les cartons, il brinquebalait. Dans la voiture au milieu des cahin-caha, il manqua de s’ébrécher, cicatrice qui peut-être lui aurait été fatale pour son séjour au milieu de ces humains.

Mais il arriva à bon port.

Il n’y avait plus de buffet, c’était trop petit pour se le permettre. Il resta donc un temps dans l’un des cartons qui jonchaient le sol. Bébé, qui avait commencé à marcher, le vit et s’en saisit. L’adopta. 

Il resta là, comme une poupée dans les bras de Bébé, le bibelot.

–––– Signé : Thaïs Andreani-Pertica


LIVRE NRF

Je prends un vieux livre de la nrf. Le grain est rugueux et en fermant les yeux, on pourrait croire, l’espace d’un instant qu’il s’agit d’un texte écrit en braille.  

Rien de rugueux pour une fourchette. C’est piquant quand elle est posée sur le dos et que l’on passe le doigt sur les dents.

Mais que ce soit le livre ou la fourchette, chaque instrument peut devenir un objet dangereux. 

Qui ne s’est pas coupé avec le tranchant d’une page d’un livre ?

Quant à la fourchette, elle me fait penser à Folcoche qui la plantait dans la main de ses fils quand ils ne se tenaient pas bien à table selon elle.   

Le point commun ? Relire « Vipère au poing », bien sûr ! Oublier la dureté du texte et s’adonner au plaisir de lire.

––– Signé : Colette Couderc

 


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