PAS MON GENRE, Léa Cuénin
Elle ne me plaisait pas, pas mon genre
Elle ne me plaisait pas, pas mon genre. On fréquentait les mêmes cercles pourtant peu fréquentables, les mêmes soirées où je prenais sur moi pour tolérer sa présence, tout en la maintenant à distance. À l’époque, c’est-à-dire il y a neuf ans, autant dire une éternité, la fête commençait vraiment quand elle faisait son entrée avec l’un ou l’autre des invités. Elle prenait beaucoup de place. Elle monopolisait l’attention et les chiottes, dans lesquels tout le monde se pressait. Attirés comme des aimants. Mon indifférence à son égard s’est rapidement muée en détestation profonde. C’était chimique. Je haïssais davantage ceux qui tombaient sous son charme : ravages.
Puis un soir, pas si différent des autres, tout a changé.
Puis un soir, pas si différent des autres, tout a changé. Personne ne se souvient de notre première nuit ensemble. Ça les aurait étonnés s’ils n’avaient pas été aussi défoncés.
Toutes les planètes étaient rangées en une ligne parfaite que je n’ai pas hésité à franchir, à cheval sur la cuvette.
Toutes les planètes étaient rangées en une ligne parfaite que je n’ai pas hésité à franchir, à cheval sur la cuvette. Toujours douce pour moi, elle devenait dure dans ma bouche. Immédiatement après ce premier baiser, j’ai regretté tout ce que j’avais pensé d’elle. Elle a ouvert une nouvelle voie, entre mes deux yeux.
Pile à cet endroit, un tube a perforé mon os frontal et s’est divisé en deux, une partie encerclant mon hémisphère gauche, l’autre encerclant mon hémisphère droit. Les deux parties se sont rejointes à l’arrière de mon crâne et le tube a débouché par un trou de taille identique au premier.
En inspirant, je pouvais sentir l’air qui s’engouffrait par l’avant, contournait mon cerveau de part et d’autre en produisant un massage agréable, et ressortait par l’arrière. J’aurais pu aspirer l’univers par ce petit orifice.
Une ligne en entraînant une autre
Une ligne en entraînant une autre, je suis devenue accroc à ces moments où elle prenait possession de mon corps. J’habitais l’abîme. Tout pouvait s’effondrer, à tout moment. Je jouais avec la limite.
La drogue a sauvé ma vie.
Léa Cuénin participe à l’atelier d’écriture en nomade. Il s’agit alors de composer sa suite d’ateliers et échanger avec l’animatrice d’atelier à distance, Mathilde Pucheu, pour définir des points d’amélioration, identifier des procédés techniques, pas à pas ! Elle a également écrit : Camy !
▶ Léa Cuénin participant.e aux ateliers d’écriture que nous proposons.
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