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Combien tu coûtes ? Poésie

Combien tu coûtes ? de Marion Lopez-Burette est un recueil de poésie. Rémanence des mots applaudit très fort l’annonce de la publication du projet littéraire d’une participante aux ateliers d’écriture créative. C’est avec une grande générosité qu’elle a répondu à notre flot de questions…


Combien tu coûtes ? de Marion Lopez-Burette aux Editions Az’art Atelier
Photo Az’art Atelier©

Qu’est-ce que la poésie t’apporte dans l’écriture ? 

La poésie est le moyen le plus naturel et le plus évident pour exprimer mes émotions. Par exemple, si un sujet me touche particulièrement, les mots pour l’aborder vont sortir au rythme d’une musique. Dès lors, même si je m’efforce de mettre en page ces mots comme de la prose, les vers vont se découper d’eux-mêmes à l’oreille. C’est comme avec une langue que l’on aime par-dessus toutes les autres et qui s’impose à nous quand on essaie de mettre en mots.

Qu’est-ce que la poésie te permet d’explorer ?

La poésie « c’est autre chose » dit Guillevic dans une formule qui mime son contenu. Cette formule puissante évite une définition de la poésie qui enfermerait poèmes et poésie sur eux-mêmes.
Et, oui, la poésie est en effet différente. Elle existe dans l’écart, le jeu entre le signifiant (l’assemblage de lettres) et le signifié (le sens du mot). 

Pour le lecteur, la poésie est donc le lieu d’une création et d’une recréation. L’espace entre les mots physiques, leur sens et l’émotion qu’ils créent devient le terrain de jeu du lecteur à qui la poésie laisse toujours une liberté. Il s’agit en fait d’un espace que chacun peut venir habiter avec son vécu unique.
Elle est ce que l’on n’en finit pas de comprendre, soit une autre définition du mystère. C’est en ce sens qu’elle m’apporte beaucoup puisque les mots sortis à un instant précis peuvent trouver un éclairage différent à un autre moment. C’est en tout cas valable pour moi, à la fois en tant que lectrice et que poète.
 
J’aime beaucoup Graham Greene et je trouve son écriture très poétique, toute imbibée d’une poésie du quotidien. En particulier, dans son roman La puissance et la Gloire, le rapprochement entre le secret, le mystère (au sens religieux puisqu’il s’agit de l’histoire d’un prêtre pécheur) et la poésie est poignant. Greene compare l’écriture à l’ivresse. Je crois qu’il a raison. La poésie fait voir le monde comme sous l’emprise de la boisson, avec un décalage. Elle oscille entre lenteur et perspicacité et occasionne un abandon de soi et de ses mots. Elle permet alors de dire et d’explorer des choses plus vraies et plus profondes.

Combien tu coûtes ? - Photo de Marion
Marion Lopez-Burette, auteure de Combien tu coûtes ? [Editions Az’art Atelier]

 

 

Comment as-tu conçu ton projet ? 

J’ai toujours aimé écrire et déjà en classes primaires la poésie occupait une place importante dans ma vie. Puis j’ai grandi, fait des études, eu un premier enfant et finalement j’ai un peu arrêté d’écrire. Jusqu’à ce qu’un certain nombre d’événements traumatisants dans ma vie me fassent revenir à cette passion dont la dimension thérapeutique n’est plus à démontrer.

Quand j’ai recommencé à écrire, je me suis aperçue que tous les textes que j’écrivais rendaient palpable ma révolte contre les injustices de ce monde. C’est autant la forme, souvent redoutable et décapante, que le sujet qui m’a fait comprendre que ces textes formaient un tout.

J’avais l’impression d’en vouloir à un système qui asservit les Hommes et aux Hommes qui l’acceptent, et parfois même le portent, comme on enfile un jeans parce que c’est plus confortable.
Comme les rares personnes à qui j’ai lu ces poèmes ont paru profondément touchées, j’ai décidé de réunir les textes en un recueil. Ce sont donc la réception et les retours qui m’ont aidée dans l’avancée de mon projet. 

L’organisation du recueil ne correspond pas à l’ordre d’écriture. J’ai fait un travail de mise en page et d’organisation assez conséquent, notamment parce que mon écriture a un aspect incisif, abrupt, dérangeant et parfois cruel. Celui-ci s’associe à la tendresse et l’attention sensuelle à l’humain, mais dans un second temps seulement. Il fallait laisser assez de place au lecteur pour entrer en relative douceur dans le recueil tout en respectant la musique saccadée qui lui était propre.

A partir de quel moment as-tu senti que le projet prenait forme ?

On sent que ça prend forme quand on imprime un premier jet, quand on peut toucher le papier sous ses doigts. Je n’avais rien imaginé du tout au départ, ce qui m’a permis de rester très ouverte à toutes les propositions de la directrice de la maison d’édition Az’art atelier éditions : qui a été de très bon conseil. Sa démarche éditoriale veille à laisser la porte de l’interprétation ouverte pour les lecteurs. 

Combien tu coûtes ? - Photo du livre
Peinture Françoise STRA©

Qu’est-ce qui est important pour toi pour créer de la poésie ?

Les sensations sont à l’origine de ma poésie : l’air frais un matin en sortant de la maison, une boule dans la gorge qui semble vibrer… Mais je suis aussi hantée et touchée par les gestes du quotidien. Et puis, j’aime inscrire ces sensations et ces gestes dans des histoires. Cela donne parfois des poèmes avec une certaine dimension narrative mais dont la trame ne s’impose pas à chacun de la même manière.

Parfois, une photo ou un tableau me touchent même si le texte qu’ils susciteront n’aura pas de lien évident avec l’œuvre picturale.

Quel lien ta poésie entretient-elle avec ton écriture narrative ?

J’ai l’impression que l’écriture narrative précède le poème, même si évidemment je n’ai pas littéralement besoin d’écrire en amont le texte en prose. Disons que l’écriture narrative précède certainement la poésie dans mon esprit. Je choisis très souvent la poésie parce qu’elle me fait sauter plus haut et plus loin : elle se nourrit de l’écart.

Ecrivais-tu pour un/des lecteur(s) ?

Non, bien au contraire. C’est seulement maintenant que je commence à imaginer leurs visages et leurs diversités et à comprendre ce que livrer ses mots veut dire : accepter qu’ils soient aimés, détestés, critiqués, mal vécus…

Si j’avais écrit pour des lecteurs, je me serais sentie nue tout au long de l’écriture.

Comment est née ta collaboration avec la maison d’édition Az’art Atelier ?

J’ai rencontré une personne qui compte beaucoup pour moi aujourd’hui et qui venait de publier un recueil chez Az’art Atelier. J’ai acheté son livre, comme on le fait poliment, et j’ai été transportée par le recueil comme par la beauté de l’objet. Le travail éditorial était profond et ajusté à la musique qui se dégageait des textes. On aurait dit que le livre mimait le ressac des vagues (le recueil s’intitule Boire la Lettre de l’Oubli,et se nourrit d’images marines). Alors j’ai commandé un autre livre sur le site de cette maison, puis je l’ai cherchée sur les salons du livre et, finalement, au moment d’envoyer mon manuscrit, j’ai eu envie de me tourner vers cette maison. 

Chaque livre y est unique : du format à la couleur du papier utilisé. 

D’ailleurs c’est une maison qui publie des « écrits singuliers » et fuit les déjà-vus.

Développes-tu un nouveau projet ? 

Oui, je suis sur le point de terminer un recueil qui s’intitulera J’ai égaré la nuit. En voici un extrait :

Ce que tu regardes te regarde
J’ai regardé mes mains
Elles m’ont tendu le vide
Je les ai agitées 
Tu m’es tombé des mains 

Extrait de J’ai égaré la nuit de Marion Lopez-Burette
► Découvrir et lire un extrait Combien tu coûtes ?  de Marion Lopez-Burette
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