Maupassant et troubles psychiques
Le cas clinique de Maupassant par Gallica
Françoise Deherly, chargée de collections au département « Sciences et techniques » de la Bibliothèque nationale de France (BNF), nous fait l’honneur de partager certains des articles qu’elle rédige pour le blog de Gallica. Elle partage le fruit de ses recherches avec beaucoup de précision et de détail. Cela représente des sources de connaissances très riches qui viennent compléter notre érudition (du moins renforcer notre culture générale) et, pourquoi pas, inspirer des récits ?! Commençons par Guy de Maupassant : « Le cas clinique de Maupassant : chute du météore des lettres »…

Maupassant, grand écrivain !

Guy de Maupassant est célébré pour ses nouvelles et ses romans. Parmi les plus célèbres, on compte Le Horla (nouvelle fantastique), Une vie, Bel ami (romans). Il a inspiré de nombreux réalisateurs qui ont adapté son oeuvre au cinéma. Les films basés sur l’oeuvre de l’ami de Gustave Flaubert et Emile Zola sont, notamment, Masculin-Féminin de Jean-Luc Godard, La Maison Tellier, Le Masque, Le Modèle de Max Ophüls ou même Oyuki la vierge de Kenji Mizoguchi (Boule de suif).
Apprendre à écrire avec Flaubert

Avec pour mentor Gustave Flaubert – Normand comme lui –, Guy de Maupassant fait ses débuts dans le journalisme et, pas à pas, dans la littérature. La relation qui se tisse entre les deux écrivains sera fructueuse pour Maupassant car il aura ainsi bénéficié d’un coaching littéraire privilégié, motivant mais sans concession :
« Il faut, entendez-vous, jeune homme, il faut travailler plus que cela. J’arrive à vous soupçonner d’être légèrement caleux. Trop de putains ! trop de canotage ! trop d’exercice ! oui, monsieur ! Le civilisé n’a pas tant besoin de locomotion que prétendent les médecins. Vous êtes né pour faire des vers, faites-en ! “Tout le reste est vain” à commencer par vos plaisirs et votre santé ; foutez-vous cela dans la boule. » – Gustave Flaubert, Lettre du 15 août 1878
Vie de Maupassant
Auteur fécond vivant de sa plume dès 1880, il est également très sportif, nous apprend l’article de Gallica :
« […] s’adonne au canotage, à la natation, à la pêche, à la chasse, à l’escrime. » – Source Gallica
Une hygiène de vie qui pourrait nous rappeler le « coureur de fond » qu’est Haruki Murakami. Mais la différence se situe dans les fréquentations de Maupassant. En effet, l’article de Françoise Deherly évoque les succès féminins de l’auteur :
« […] il fréquente aussi assidûment les demi-mondaines, cocottes et prostituées des maisons closes. Ses compagnons relatent sa sexualité débridée lors de bacchanales ou orgies. » – Source Gallica
C’est ainsi qu’il contractera la syphilis (infection bactérienne sexuellement transmissible aux effets dramatiques, avant la découverte des antibiotiques).

Maupassant et la drogue
Françoise Deherly évoque une recherche d’étourdissement de la part de Maupassant, pour calmer son âme probablement. Mais pour soulager les souffrances que ses migraines et les symptômes de la syphilis provoquent, il va recourir à différentes drogues :
« morphine, parfois le haschich, la cocaïne ou l’opium. »
La drogue, remède au syndrome de la page blanche ?
C’est finalement l’éther qui à la fois anesthésie ses migraines et déclenche sa créativité, selon l’expertise de Françoise Deherly. L’éther aurait eu pour effet de lutter contre le syndrome de la page blanche :
« […] ce produit aurait eu un effet excitant sur le système nerveux […] l’éthéromane éprouve une sensation de légèreté corporelle et de lucidité psychique. »
Evidemment, à Rémanence des mots, on propose d’autres techniques d’émulation créative qui s’appuient sur des outils ludiques et un collectif. La preuve des limites de la drogue dans le cas Maupassant : les conséquences !
Les conséquences de l’éther sur l’écrivain

© Musée des Augustins de Toulouse
Les effets à moyen terme de l’éther sur Maupassant freinent finalement l’écriture. En effet, il subit une phase d’aphasie qui se caractérise par une perte partielle ou complète de la capacité à s’exprimer ou comprendre le langage écrit ou parlé. L’éther aura provoqué une lésion des aires du cerveau qui contrôlent le langage.
S’il reste muet pendant un mois, – malgré son sevrage –, une fois ses capacités cérébrales récupérées, il redevient dépendant – nous explique l’article. Les symptômes générés par la prise de drogue augmentent entraînant des périodes d’hallucinations : « il croit voir son double ». Ce phénomène s’appelle l’autoscopie.
La maladie de Maupassant
Ses parents et son frères souffrent aussi de troubles psychiques. L’article en apporte de nombreux détails édifiants. Guy de Maupassant sera à son tour interné en 1889. Il mourra donc en asile deux ans plus tard.
Le Horla peut être perçu comme une nouvelle prémonitoire, pourtant elle aurait été écrit alors que l’écrivain était en pleine possession de ses moyens.
L’article de Gallica : Passionnant
Découvrez l’article dans son intégralité. Il dresse le tableau clinique de la pathologie dont souffrait Maupassant et revient sur les conditions d’écriture du Horla. Lire l’article « Le cas clinique de Maupassant : chute du météore des lettres »
Cela vous inspire-t-il un récit ? A vos stylos, à vos crayons, à vos claviers !
Françoise Deherly a participé, notamment, à une série d’articles sur les pionnières de la médecine, mettant en lumière la place des femmes dans un milieu à l’époque très masculin.
Lire d’autres articles de Françoise Deherly sur le blog de Gallica ► Ceux qui se prenaient pour Napoléon ► Constanza Pascal, première femme aliéniste de France [Pionnières de la médecine] ►Le docteur Girard-Mangin était une femme ! [Pionnières de la médecine] Françoise Deherly a été stagiaire lors de la formation « Ecrire pour un blog » encadrée et animée par Rémanence des mots pour la BNF.
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