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La main – Par La Jeune fille à la robe rouge

Ce texte a été écrit suite à un atelier d’écriture.

Assise sur le lit, elle réfléchit. Regarde à travers la fenêtre, des femmes, des enfants, des hommes, des vieux, des vieilles, – elle le déplore d’ailleurs –, et autres personnes qu’on peut voir lors d’une balade du dimanche, où tout le monde semble heureux, où tout le monde sourit sans savoir pourquoi. Mais elle, elle ne sourit pas. Elle les observe et se demande s’ils sont vraiment aussi contents qu’ils en ont l’air. Elle n’a pas le temps de sortir en cette douce journée de printemps. Quelque chose la tracasse. Assise sur son lit, vêtue d’une robe rouge à fleurs blanches qu’elle adore mais qui n’est pas au goût des personnes de son âge. Elle se ronge les ongles. Elle commence par la main gauche.

Le pouce.

Un jour, assise à la table d’un café parisien, elle avait croisé une jeune femme, belle, gracieuse, elle l’enviait. Les hommes la regardaient, dès qu’ils la voyaient ils ne pouvaient plus ôter de leur mémoire sa démarche et ses yeux couleur océan. Elle aurait tellement aimé être à sa place. Mais elle savait qu’elle ne serait jamais aussi gracieuse que cette jeune femme aux cheveux dorés et aux doigts de fée. 

Comment s’appelait-elle ? 

L’index.

La main - la fille en rouge

Dès qu’elle voyait cette femme, elle avait envie de lui voler son corps, sa vie, ses hommes.Mais c’est si dur de se rappeler son nom. Pourquoi ne s’en souvient-elle pas ? Et pourtant elle a l’impression qu’elle le connaît depuis toujours. Mais impossible de se rappeler son nom. Marie, Alice, Josephine ? Impossible de se remémorer. 

Le majeur. 

Elle avait fait une fête pour son dix-huitième anniversaire. La jeune femme était là. Elle portait une robe un peu trop jolie pour l’occasion. Tous les jeunes hommes invités ne s’occupaient pas d’elle mais d’une autre. La fille à la robe élégante, toujours cette fille dont elle ne se souvient pas le nom. Julie, Candice, Amandine ? Pourquoi persister. Il le faut, elle ne peut pas faire autrement. 

L’annulaire. 

Le jour où elle s’est mariée, la jolie fille était là. Elle était encore plus belle que la mariée. Même son époux ne voyait qu’elle. C’est peut-être pour cela qu’il est parti avec elle. Mais elle n’était pas triste. Elle avait accepté son malheur. Elle n’aimait pas son mari. Un amour dissipé, bafoué, mort avant même de naître ? Romane, Marguerite, Pauline ?

L’auriculaire. 

A la mort de son mari, la belle était encore là. Elle pleurait, son mascara coulait sur ses joues. Son menton tremblait, elle était encore plus belle que lorsqu’elle souriait. Elle n’avait toujours pas vieilli. C’était étrange. 

Son ongle s’est arraché. Elle l’a rongé jusqu’au sang.Mais ça y’est, elle l’a trouvé. Le nom de la belle qui la hantait tant. C’est en se regardant dans le miroir qu’elle se rendit compte que cette femme, celle qui obnubilait ses pensées. C’était elle. La jeunesse. Sa propre jeunesse. 

La vieille femme se leva enfin. Et partit faire un tour dans le parc, un beau dimanche de printemps. Avec les autres vieilles qu’elle déplorait tant. 

 


La Jeune fille en rouge participant.e aux ateliers d’écriture que nous proposons.
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