Les figures de style
Les figures de style, qui êtes-vous ?
Les figures de style, appelées aussi figures de rhétorique, sont des procédés linguistiques et littéraires qui servent à séduire, émouvoir, convaincre, persuader son auditoire ou son lecteur.
Elle s’écarte de l’usage fonctionnel de la langue afin de donner un caractère vivant et éloquent au discours.
Les figures de style sont les outils incontournables de la rhétorique. L’art de convaincre et de séduire est d’autant plus appuyé par les fonctions d’enjolivement et d’argumentation de celles-ci.
En littérature, elles permettent de toucher son lecteur et d’illustrer son propos.
La frontière entre les différentes figures de style est mobile, il n’est pas toujours aisé de les placer exclusivement dans une catégorie.
La note de Théo : En gros ça fait beau, mais ça peut aussi apporter de la subtilité et de la profondeur à un texte. Il n’y a pas de formule mathématique pour définir une figure de style, certaines s’imposent comme appartenant à telle catégorie, pour d’autres je réfléchis encore où je dois les placer.
PS : On fait tous des figures de style sans s’en rendre compte, le but ici est de le découvrir.
PS 2 : Si vous désirez en apprendre un peu plus sur l’utilité des figures de style dans la littérature, nous avons un article dédié (cliquez).
Les figures de style sont classées en plusieurs catégories (si vous désirez juste consulter une figure de style, n’hésitez pas à cliquer dessus).
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Figures de l’analogie (Comparaison, métaphore, allégorie, personnification)
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Figures de la substitution (Métonymie, synecdoque, périphrase, antonomase)
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Figures de l’opposition (Antithèse, antiphrase, oxymore, chiasme, paradoxe)
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Figures de l’amplification (Hyperbole, gradation, accumulation, paronomase)
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Figures d’insistance (anaphore, répétition, redondance, pléonasme)
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Figures de l’atténuation (litote, euphémisme, ellipse)
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Figures de la construction (parallélisme, anacoluthe, asyndète, rhétorique, zeugme)
L’allitération et l’assonance
L’anagramme
Les figures de l’analogie :
Ce sont des figures qui présentent des rapports de similitude entre une chose et une autre ; semblable, comparable. On y retrouve les figures de style les plus connues comme la comparaison et la métaphore. Souvent utilisées en littérature comme dans la musique pour leur efficacité.
La comparaison :
Elle établit un lien entre deux éléments à partir d’un point qui leur est commun. Elle comprend toujours au moins deux termes (le comparé et le comparant). Le rapprochement entre ces deux éléments s’effectue grâce à l’outil de comparaison.
- Le comparé : élément réel
- Le comparant : élément qui permet d’illustrer le comparé
- L’outil de comparaison : comme, tel, ressembler à, aussi que…
La comparaison permet d’expliquer une image mais aussi de mettre en relation deux mondes.
Exemple :
« Mais. Comme un bonbon à sucer qui se termine trop vite ou l’amertume d’un chewing-gum trop longtemps mâchouillé, les mots deviennent presque ordinaires et insipides. » Delphine, Écrire le bien-être
« Et cette terre était proche, et elle lui apparaissait comme un bouclier sur la mer sombre. » Homère, L’Odyssée
« Mal vieillir comme un vieux punk » Orelsan, San
La métaphore :
(latin metaphora, du grec metaphora, de metapherein « transporter »)
À la différence de la comparaison, les deux éléments comparés n’ont pas de mot de comparaison intercalé ce qui tend à un sous-entendu plus implicite.
Elle appuie un élément par une image, un symbole pour donner une intensité ou une connotation de cet élément.
La métaphore filée : c’est une suite de métaphores sur le même thème.
Elle est très proche de la comparaison mais ce qui la différencie c’est ce lien qu’elle établit entre les deux termes comme une métamorphose littéraire.
Exemples :
« Roissy est sur la Lune, et Air France une compagnie spatiale pour tout Africain. » Gauz, Black Manoo
« Un gros serpent de fumée noir… » Guy de Maupassant, La peur
« Le monde est un PMU » Orelsan, San
L’exemple de métaphore filée le plus connu :
« L’empereur était là, debout, qui regardait.
Il était comme un arbre en proie à la cognée.
Sur ce géant, grandeur jusqu’alors épargnée,
Le malheur, bûcheron sinistre, était monté;
Et lui, chêne vivant, par la hache insulté,
Tressaillant sous le spectre aux lugubres revanches,
Il regardait tomber autour de lui ses branches. »
Victor Hugo, L’Expiation
Ici l’empereur est comparé à un arbre et la métaphore filée poursuit la suite de cette comparaison avec les termes en gras.
Si vous désirez aller plus loin sur la métaphore nous avons un article qui lui est dédié (cliquez).
L’allégorie :
(latin allegoria, du grec allêgorein « parler par images »)
C’est une représentation concrète d’une notion abstraite. Elle utilise régulièrement un symbole en passant par la métaphore, la personnification ou une image pour décrire cette idée abstraite. À travers aussi, des procédés narratifs et descriptifs, une histoire est déployée pour exprimer cette idée et la rendre moins abstraite.
Elle n’est pas à confondre avec la métaphore car elle porte sur une pluralité d’éléments. Tandis que la métaphore porte sur un seul élément. L’allégorie permet de créer une relation entre deux mondes.
Exemple :

Une oeuvre bien connue, mais surtout une allégorie de l’automne !

Évidemment comment ne pas parler de l’une des figures d’allégorie les plus connues en France.
« La rêverie… une jeune femme merveilleuse, imprévisible, tendre, énigmatique, provocante, à qui je ne demande jamais compte de ses fugues. » André Breton, Farouche à quatre feuilles
« En attendant je n’suis qu’un résidant de la caverne de Platon » Scylla, La sagesse d’un fou
Personnification :
Elle substitue une idée, un animal, un objet à des caractéristiques humaines. L’analogie comporte un comparé inanimé et un comparant animé exprimé par un nom, un adjectif, un verbe… Elle permet de créer des images originales voir irrationnelles, absurdes.
Exemple :
Vous ne l’aviez pas vu venir cet exemple ? Mais vous, vous avez déjà rencontré une vache qui rit ?
« Le Pot de fer proposa
Au Pot de terre un voyage. »
Jean de la Fontaine, Fables
Oui Jean de la Fontaine fait des personnifications autres que celles contenant des animaux.
« cul nul sur une jument qui chante à ma gloire » Kheops, Sad Hill
Les figures de substitution :
Ce sont des figures comportant deux mots qui peuvent se substituer l’un à l’autre. Un terme ou une expression peut en remplacer, changer un, ou une autre. Ça paraît logique comme ça ? Vous allez voir que ça se complexifie un tout petit peu. De plus, ce sont des figures de style qu’on emploie la plupart du temps sans s’en rendre compte.
Métonymie :
(bas latin metonymia, du grec metônumia, de meta « déplacement » et onoma « nom »)
C’est un procédé dans lequel on remplace un terme par un autre terme qui lui est relié par une relation nécessaire (un rapport logique). Le contenu remplace le contenant, la cause remplace l’effet, l’objet remplace l’origine…
Exemple :
Vous connaissez peut-être ce tableau. Mais saviez-vous que c’était une métonymie ? Ce n’est pas une pipe mais la représentation d’une pipe.

« Paris a froid, Paris a faim. » Paul Éluard, Courage
Oui « Paris a froid, Paris a faim » peut aussi être une personnification. Mais dans cet exemple Paris est l’ensemble des habitants de la ville de Paris.
On utilise tous les jours des métonymies sans s’en rendre compte par exemple « on va boire un verre avec des amis » ou « on vit de son travail« .
Synecdoque :
(latin synecdoche, du grec sunekdokhê « compréhension simultanée »)
C’est une variation de la métonymie, on peut dire que la synecdoque est une métonymie, mais pas l’inverse. Elle permet d’élargir ou de restreindre le contenu d’un mot. On remplace un mot par l’une de ses parties ou l’ensemble dont il fait partie. (J’avais prévenu que ça se complexifiait un tout petit peu).
Exemple :
Vous vous rappelez de l’exemple de la métaphore « Un gros serpent de fumée noir… » ? Pour une synecdoque on peut dire « Le train émet une fumée noire. ».
« La France remporte la coupe du monde. »
Ça ne vous dit toujours rien ? « Je vais boire un verre avec des amis. » (Oui j’utilise deux fois cet exemple, rappelez-vous une synecdoque est une variation de la métonymie).
« C’est à Fleury qu’on fane » Booba, Soldats
Périphrase :
(latin periphrasis, du grec peri « autour » et phrazein « parler » : « exprimer par circonlocution »)
C’est dire en plusieurs mots ce que l’on pourrait dire en quelques mots. On remplace le terme par une suite de mots qui le définissent ou le paraphrasent de façon imagée. On utilise beaucoup cette figure de style en littérature pour éviter les répétitions (d’où la nécessité d’un dictionnaire des synonymes). C’est aussi un moyen de mettre en valeur la réalité évoquée.
Exemple :
La première périphrase qui me vient et qu’on utilise régulièrement « Ne pas avoir toute sa tête » pour parler d’une personne folle.
Il y a aussi « Passer l’arme à gauche », « les personnes du troisième âge », « les demandeurs d’emploi ».
« Allez, j’viens d’la ville lumière » Alpha Wann, ça va ensemble
Antonomase :
(grec antonomasia, de anti « à la place de », et onoma « nom »)
Une autre variante de la métonymie-synecdoque, elle consiste à remplacer un nom propre par un nom commun ou inversement. Je vous avais bien dit que ça se « complexifiait ».
Exemple :
J’ai dit que ça se complexifiait, mais vous faites encore plus d’antonomases que de périphrases, de synecdoques ou de métonymies et le tout sans vous en rendre compte.
« Je bois un bon Côte du Rhône en regardant un documentaire sur l’empereur des français même si je trouve que le présentateur est un peu Tartuffe. » Le Côte du Rhône, le vin rouge, l’empereur des Français, Napoléon et Tartuffe, pour une personne hypocrite.
Il y a aussi des antonomases métaphoriques (pas d’inquiétude ce n’est qu’une association de mots), par exemple une bien connue : « Île de beauté » pour évoquer la Corse.
Les figures de l’opposition :
Ce sont des figures qui comportent deux termes qui peuvent se substituer l’un à l’autre (non ce n’est pas identique aux figures de substitutions). Le principe est de regrouper deux idées contraires dans une même phrase ce qui va provoquer un effet de confusion sur le lecteur.
Antithèse :
(du grec antithesis « opposition », composé de anti « contre » et thesis « action de poser, de placer, d’instituer »)
C’est le principe de rapprocher dans le même énoncé deux termes de même nature mais de sens contraire. Vous la connaissez forcément : thèse, synthèse, antithèse… Bon pas vraiment, mais cette figure de style vous permet d’opposer deux termes afin d’accentuer votre message et même de créer un effet sonore.
Exemple :
En cherchant des exemples, j’ai réalisé à quel point nous sommes entourés d’antithèses dans la littérature :
Guerre et Paix, Tolstoï
Le Rouge et le Noir, Stendhal
La Belle et la Bête, Le prince de Beaumont
L’Être et le Néant, Sartre
Presque rien sur presque tout, Ormesson
« Paris est tout petit, c’est là sa vraie grandeur. » Jacques Prévert, Paris est tout petit
« On est faits pour vivre au soleil mais l’inspiration est devenue lunaire » Népal, Malik Al Mawt
Antiphrase :
(du grec antiphrasis « désignation par le contraire », composé de anti « contre » et phrasis « phrase »)
Cette figure permet d’exprimer par ironie ou euphémisme un sens contraire à son véritable sens. Le procédé exprime une idée opposée à ce que l’on veut dire en réalité.
Vous remarquerez qu’il est plus aisé de le faire à l’oral parce qu’on peut s’appuyer sur le visage, les gestes, les intonations. En revanche, à l’écrit il faudra à l’auteur.e utiliser divers procédés comme des figures d’amplification, faire apparaître l’ironie à la chute du texte…
Exemple :
« – Bah bravo Jean Mie ! C’est du propre ce travail !
– Oh la ramène pas Patoche !
– Nan mais bien ! Continue comme ça ! T’es sur la bonne voie !
– Tu vois bien qu’avec le temps magnifique j’ai pas pu nettoyer derrière moi.
– Dis plutôt que c’est la générosité du patron qui te fait bosser comme ça.
– Il est beau lui !
– C’est malin ! Demain tu te fais virer. » Jean Théo, Humoriste.
Oxymore :
(du grec oxumôron « ingénieuse alliance de mots contradictoire »)
Elle associe deux termes contradictoires. Comme l’antithèse, elle rapproche deux termes opposés mais ils sont mis côte à côte dans l’énoncé. Cette contradiction peut seulement être apparente, elle permet néanmoins de créer une réalité poétique qui peut susciter l’étonnement.
Exemple :
« Cette obscure clarté qui tombe des étoiles » Corneille, Le Cid
« Éclairés par l’obscure clarté de l’espoir » NTM, Qui paiera les dégâts ?
« Mais quelle est cette sombre lumière » Gringe, Paradis Noir
Chiasme :
(grec khiasmos, disposition en croix)
C’est une figure dans laquelle les contraires s’opposent dans une forme AB-BA. Elle joue sur au moins quatre termes dans cette double formulation où les mots s’inversent. L’effet que produit le chiasme porte sur le rythme et la répétition des termes, mais il permet aussi de créer une forme d’antithèse. Il y a aussi la polysémie des termes qui peut créer un effet (dernier exemple).
Exemple :
« Ce n’est point parce qu’il est difficile que nous n’osons pas ; c’est parce que nous n’osons pas, qu’il est difficile. » Sénèque, Lettres à Lucilius, Lettre 104
« Qui craint de souffrir, il souffre déjà de ce qu’il craint. » Montaigne, Essais
« Le temps du cours j’inversais le cours du temps » Nekfeu, Nekketsu
Paradoxe :
(grec paradokson, de para, à côté, et doksa, opinion)
Cette figure défie la logique en présentant des termes contradictoires. Les termes opposés sont liés afin de surprendre, choquer l’opinion générale et les idées communes. Contrairement aux autres figures d’opposition qui jouent sur le sens des mots, le paradoxe agit sur le contexte et le sens commun qui l’entoure.
Il faut comprendre que le paradoxe est une démonstration absurde qui a pour but de faire réfléchir le lecteur.
Exemple :
« Ne lisez pas cette phrase. » C’est quand même paradoxal de lire une phrase dans laquelle il est dit de ne pas la lire.
« Paris est tout petit, c’est là sa vraie grandeur. » Jacques Prévert, Paris est tout petit ; Oui je l’ai déjà utilisé comme exemple dans l’antithèse et oui cet exemple contient un effet paradoxal, le fait que la vraie grandeur de Paris est d’être tout petit.
« Aucune bonne action ne reste impunie. » Oscar Wilde
« Ainsi les derniers seront les premiers, et les premiers seront les derniers. » La bible, Le Nouveau Testament, Évangile selon Saint Matthieu, 20:16. J’avoue j’ai toujours rêver de placer la bible dans les exemples.
Les figures de l’amplification :
Ces figures accroissent le sens d’un mot, le rendent plus évocateur, voire l’exagèrent. Dans le langage populaire, on appelle ça « faire le marseillais ».
Hyperbole :
(grec huperbolê, excès)
Elle amplifie une idée pour créer une forte impression. En jouant sur le lexique et la syntaxe, elle permet de convaincre ou d’amuser le lecteur.
Exemple :
« Ses moindres actions lui semblent des miracles. » Molière, Tartuffe
« Serais-je donc le seul lâche sur la terre ? » Louis-Ferdinand Céline, Voyage au bout de la nuit
« Si je traîne en bas de chez toi je fais chuter le prix de l’immobilier. » Booba, Boulbi – C’est ce qu’on appelle communément un « ego trip ».
Gradation :
(latin gradatio, –onis, de gradus, degré)
Cette figure ordonne des termes selon une progression dans l’énumération. Cette progression suit une forme croissante ou décroissante. Elle va permettre de dramatiser ou d’augmenter la force de l’amplification.
Exemple :
« Contraste : le silence est d’or mais les gens parlent d’argent, et dès qu’ils partent en faire, ils finissent en taule. Tout ça pour du métal … » Kacem Wapalek, Décalage
« Ils s’accrochent, ils mordent, ils lacèrent, ils en bavent. » Louis-Ferdinand Céline, Voyage au bout de la nuit
« Les vieux ne bougent plus (…) leur monde est trop petit
Du lit à la fenêtre, puis du lit au fauteuil et puis du lit au lit. » Jacques Brel, Les vieux
Accumulation :
(du latin accumulare, mettre en scène, et cumulus, amoncellement)
C’est le fait de faire succéder des mots ou groupe de mots de même nature et de même fonction grammaticale, qui donnent un effet de profusion. Cet effet permet d’enrichir la pensée de l’auteur mais aussi de donner un rythme à la phrase. J’aurais aussi pu ajouter la figure de style de l’énumération qui, à la différence de l’accumulation, ordonne les différents termes.
Exemple :
« Je m’en vais vous mander la chose la plus étonnante, la plus surprenante, la plus merveilleuse, la plus miraculeuse, la plus triomphante, la plus étourdissante … » Lettre de Mme de Sévigné à M. de Coulanges
« Des crises, des crimes, des cris, des griffes que nous vernissons » Nekfeu, Humanoïde
Paronomase :
( du grec ancien, parônumos, qui porte un nom semblable, qui vient d’un autre mot )
Cette figure consiste à employer des mots de sonorités parentes (paronymes) mais avec un sens différent, dans une même phrase. Ça donne un effet poétique et saisissant et peut laisser penser que les mots sont connexes.
Exemple :
« Quand on veut, on peut. » Vous le connaissez ce proverbe ? Mais depuis quand vouloir et pouvoir peuvent paraître liés ?
« Qui s’excuse s’accuse. » Stendhal, Le Rouge et le Noir
« Les conflits prolifèrent dans les zones pétrolifères » Fonky Family, La guerre
Les figures d’insistance :
Ces figures insistent sur le message pour souligner la force de celui-ci. Elles sont souvent mélangées aux figures d’amplification, car quasiment similaires, mais j’ai choisi de les différencier parce qu’elles ne créent pas le même effet ; moins dans l’exagération mais plus dans le fait d’attirer l’attention. Dans le langage populaire on appelle ça « un gros forceur ».
Anaphore :
(latin anaphora, du grec anaphora, action d’élever)
Ce procédé d’amplification rythmique consiste à répéter le même terme au début de chaque phrase, paragraphe ou vers. Abondamment utilisée dans la littérature et la poésie, elle crée un effet d’accentuation sur certaines sonorités ou idées.
Exemple :
« Le limon se fendille, il grille et s’éparpille
Le limon s’épaissit et devient une étoffe
Le limon s’éparpille et devient limitrophe. » Raymond Queneau, Petite Cosmogonie portative
« Chantez-moi, la mauvaise étoile, les blessures du Soleil
Chantez, souffle coupé, l’enfant qui dort sur un carton
Chantez l’homme qui décrocha la Lune
Chantez l’oseille, Rothschild, Bill Gates ou l’absence d’horizon » Georgio, Ici-bas
Répétition :
Une répétition d’un même terme dans un énoncé. J’ai pris un exemple de Jacques Brel car je le trouve très évocateur. Brel utilisait beaucoup la répétition qui crée l’effet d’hésitation d’une personne qui cherche ses mots, mais aussi une rythmique bien singulière.
Exemple :
« Et puis, et puis infiniment
…
Et elle, elle reste là » Jacques Brel, Orly
« … et si la tête tombe, le reste tombe. Il ne faut pas casser notre tête, mais on peut casser nos membres. Quand on casse un membre, on se souvient du membre. » Laura Vazquez, La semaine perpétuelle
Redondance :
Elle accentue un effet en utilisant abondamment des synonymes dans la même phrase. Ça peut aussi être la répétition d’une idée dans des formulations différentes toujours dans une même phrase.
Exemple :
« Le corbeau honteux et confus » Jean de La Fontaine, Le Corbeau et le Renard
« C’est la grève sur le RER. J’en ai marre. Je suis harassé, fatigué, éreinté, épuisé… Venez me sauver. » Jean Théo, Dramaturge
« Cette soirée était particulièrement sombre, obscure, ténébreuse, noire. C’était une nuit pour la mélancolie. » Jean Théo, Dramaturge
Pléonasme :
(bas latin pleonasmus, du grec pleonasmos, excès)
C’est la répétition dans un même énoncé de termes ou expressions ayant le même sens.
Elle crée un effet d’insistance pour accentuer ou préciser une idée. Sorti d’un contexte littéraire, l’énoncé peut être qualifié d’erreur de langage.
Exemple :
« Il était habile chirurgien, mais il n’entendait rien à la médecine, et appliquait ce maudit émétique à tous les maux. C’était sa panacée universelle. » Georges Sand, Histoire de ma vie
« Préparez-vous à être prêt » Casseurs Flowters, 15h45 Stupide Stupide Stupide
Les figures d’atténuation :
Ces figures, au contraire des figures d’amplification, visent à réduire la force de certains mots ou de certaines expressions. On les appelle aussi figures d’omission, elles créent un effet contraire aux figures d’amplification.
Litote :
(grec litotês, simplicité)
Cette figure expose des idées en disant moins pour faire comprendre plus, c’est-à-dire utiliser un sens implicite plus fort que le sens explicite. On affirme le contraire de ce que l’on pense. On repère souvent la litote à sa double négation, une négation lexicale (haïr/aimer) et une négation grammaticale (ne… point). On l’utilise souvent pour faire des hommages ou des confessions.
Exemple :
« Nous étions quelques-uns à nous déplacer de conserve. Un jeune homme, qui n’avait pas l’air très intelligent qui parla quelques instants avec un monsieur qui se trouvait à côté de lui, puis il alla s’asseoir. » Raymond Queneau, Exercices de style
« On pense à nos potes pas morts de vieillesse » Oxmo, J’ai mal au mic
Euphémisme :
(du grec euphêmismos, emploi d’un mot favorable)
Au contraire de la litote, cette figure atténue le sens d’un terme en le remplaçant par un autre afin de voiler une réalité déplaisante. On l’utilise fréquemment dans le langage courant pour éviter l’expression de taboue ou d’idées déplaisantes. La périphrase peut être un procédé pour permettre de crée un euphémisme.
Exemple :
On en utilise au quotidien sans s’en rendre compte par exemple ; troisième âge, SDF, défavorisé, mal-voyant…
« J’veux pas passer l’arme à gauche » High Five Crew, dans cet exemple on voit l’utilisation d’une périphrase pour parler de la mort.
« Vivre est un village où j’ai mal rêvé. » Aragon, Au bout de mon âge (poème reprit par Jean Ferrat)
Vous remarquerez la porosité entre l’euphémisme et la litote mais ce qui les distingue vraiment ; la litote met en lumière une idée tandis que l’euphémisme voile la réalité.
Ellipse :
(bas latin ellipsis, du grec elleipsis, manque, omission)
On omet volontairement des mots dans une phrase qui peuvent se deviner, puisque les termes chargés de sens restent. Cette « économie de mots » est un effet stylistique en littérature, et une manière de parler courante. C’est aussi un procédé narratif, si vous désirez approfondir l’ellipse nous lui avons consacré un article (cliquez).
Exemple :
« J’ai reçu un télégramme de l’asile : « Mère décédée. Enterrement demain. Sentiments distingués. » Albert Camus, L’étranger – Ce qui est fort dans cet exemple c’est qu’en retranscrivant un télégramme, répondant à des codes spécifiques de brièveté, Camus crée des ellipses.
« II y a des choses indélébiles qui mutilent
Difficiles épousent ma peau comme textile » IAM, Une femme seule
« …Au fond, tout le monde s’en fout, les trois types, les gens autour
Gratuitement, la lame est soudaine
L’Opinel pénètre, 10 centimètres dans l’abdomen
Ça fait déjà un an, il aurait 16 ans
Son père ne s’en est jamais vraiment remis » IAM, Un cri court dans la nuit
Dans ce double exemple de IAM nous avons une première ellipse qui omet des termes pour un effet stylistique et une seconde qui accélère la narration du récit.
Les figures de construction :
Dans ces figures, le sens de l’énoncé émerge de l’organisation de la phrase. C’est la construction syntaxique et non le lexique qui donne la force stylistique de ces figures de style.
Parallélisme :
C’est la répétition d’une partie de l’énoncé dans deux phrases construites similairement. On utilise une syntaxe semblable pour les deux énoncés, cette répétition permet de rythmer la phrase. À la différence du chiasme qui se présente en AB/BA, le parallélisme se forme en AB/AB.
Exemple :
« Tu dis que tu aimes les fleurs et tu leur coupes la queue,
Tu dis que tu aimes les chiens et tu leur mets une laisse,
Tu dis que tu aimes les oiseaux et tu les mets en cage,
Alors quand tu dis que tu m’aimes, moi j’ai un peu peur. » Jean Cocteau
« La guerre est au marchand d’armes
Ce que la pluie est à l’agriculteur » R.E.D.K., Murderer
Anacoluthe :
(bas latin anacoluthon, du grec anakolouthos, sans suite)
Cette figure crée une rupture ou une discontinuité dans la construction d’une phrase, et provoque une perturbation de la compréhension qui peut laisser penser à une erreur syntaxique.
Exemple :
« Il a tout refusé, mais la noblesse de Rennes et de Vitré l’ont élu malgré lui. » Madame de Sévigné, Lettres
« Le nez de Cléopâtre, s’il eût été plus court, la face du monde en eût été changée. » Pascal, Pensées, 392
« Dès que le vent soufflera, nous nous en allerons » Renaud, Dès que le vent soufflera
Si vous désirez aller plus loin sur l’anacoluthe nous avons un article qui lui est dédié (cliquez).
Question rhétorique :
Cette figure consiste à poser une question n’attendant pas de réponse car celui qui la pose la connaît déjà. On appelle ça un piège !
Exemple :
« Mais les hommes conservent-ils de la passion dans ces engagements éternels ? » Mme de Lafayette, La Princesse de Clèves
« Car d’où est-ce que l’effet peut tirer sa réalité sinon de sa cause ? Et comment cette cause la lui pourrait-elle communiquer, si elle ne l’avait en elle-même ? » René Descartes, Discours de la méthode
Zeugme :
(grec dzeûgma, lien)
Un zeugme est une phrase qui rassemble un élément concret et un élément abstrait. En principe ces deux éléments devraient apparaître en deux phrases différentes.
Le zeugme semble accélérer le récit, comme si tout se passait au même moment.
Le zeugme crée un effet comique et entraîne une complicité avec son lecteur.
Le lecteur a deux niveaux de compréhension simultanés : il se représente deux images mentales.
Si vous voulez en apprendre plus sur le zeugme nous lui avons consacré un article (cliquez).
Exemples :
« Sa mère et la télé ont pété un câble » :
‘La télé a pété un câble’ = Réalité concrète.
‘Sa mère a pété un câble’ = Image figurée ;
« Il était au bord du fleuve et de la faillite. » (J. Echenoz) :
‘Il était au bord du fleuve. » = Réalité concrète.
‘Il était au bord de la faillite. » = Expression figurée.
« Tous les matins, avant d’aller à l’assaut de Stalingrad, Lass Kader laisse dix francs et une phrase […]. » :
‘Lass Kader laisse dix francs.’ = Réalité concrète.
‘Lass Kader laisse une phrase.’ = Élément abstrait, non physique, non palpable.
L’allitération et l’assonance
Ce sont deux procédés sonores très utilisés en musique et en poésie qui permettent de créer des effets sonores, mais aussi de produire des émotions.
L’allitération :
C’est la répétition d’une ou plusieurs consonnes dans des mots qui se suivent, produisant un effet sonore, et de suggérant certaines impressions. Cet effet permet aussi de créer une insistance qui met en perspective le sens du texte.
Elle permet de produire une musicalité, reproduire ou évoquer un bruit associé à un élément…
Exemple :
« synistre sombre seigneur » Iam, Empire
« Tamtam sculpté, tamtam tendu qui gronde. » Leopold Sedar Senghor, Femme noire
L’assonance :
C’est une figure de style qui consiste en la répétition d’une même voyelle. L’effet obtenu est un jeu de sonorité et de musicalité qui peut aussi provoquer une émotion. En définitive très proche de l’allitération (on les confond souvent). Voici une petite astuce pour les différencier :
Petit moyen mnémotechnique pour différencier l’allitération et l’assonance, la première joue sur les consonnes et finit par une consonne la deuxième joue sur les voyelles et finit par une voyelle.
Exemple :
« C’était à Mégara, faubourg de Carthage, dans les jardins d’Hamilcar » Gustave Flaubert, Salammbô
« Ils méprisent la maîtrise, je maîtrise le mépris » Nekfeu, Humanoïde
L’anagramme
Une anagramme est une figure de style qui consiste à transposer les lettres d’un mot afin de créer un nouveau mot. En jouant avec les mots c’est un moyen d’explorer la langue et ses subtilités.
Exemple :
Le saviez-vous ?
Treclau : pseudonyme d’Henri de Toulouse-Lautrec
Pauvre Lélian : dans l’ouvrage les Poètes maudits Paul Verlaine se renomme de la sorte
Voltaire : anagramme de son nom réel (Arovet L.I, c’est-à-dire Arouet le Jeune)
Marguerite Yourcenar : nom de plume de Marguerite de Crayencour
Anagramme de mots :
Désir – Rides
Migraine – Imaginer
Poires – Proies
Verre – Rêver
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