QU’EST-CE QUE LE JOURNALISME NARRATIF ?
La narration irrigue toutes les pratiques de l’écriture et même l’univers visuel (publicité, affiche, cinéma, vidéo, visuels de réseaux sociaux, etc.). Par essence, le journalisme met en perspective des histoires à travers des anecdotes, des faits-divers, des faits politiques.
Leur vocation informative et pédagogique les pousse à illustrer l’information de récits. Le journalisme narratif pousse la narration encore plus loin et s’emploie à brouiller les pistes en se rapprochant de la construction d’un roman. Non fiction ne signifie pas absence de narration, au contraire.
Mode de communication du journalisme
Dans Journalisme narratif : des enjeux contextuels à la poétique du récit, Marie Vanoost cite Raphaël Baroni« Ce que cherche à reconstruire le journaliste, c’est une cohérence permettant de relier l’événement récent à la totalité d’un vécu ou d’un état de la société (Baroni, 2009, p. 77), et révèle ainsi les intentions du journaliste. Selon Marie Vanoost celui-ci serait à la recherche d’un effet informatif mais adopterait un autre mode de communication que le rapport de faits en employant les « procédés textuels des récits intrigants, jouant sur la tension d’un dénouement incertain qui repousse – au moins – certaines clés de compréhension à la fin de l’article [ou du reportage]. »
Les procédés narratifs du journalisme
Les procédés du récit répondraient au désir éthique des journalises. En effet, ils cherchent avant tout à intéresser le lecteur, peu importe la stratégie. Ainsi, « Intéresser le lecteur au récit, l’attirer dans l’histoire et l’y garder jusqu’à la fin, peut être considéré comme un enjeu éthique, dans la mesure où cela permet de transmettre des informations à ce lecteur, et donc de faire progresser la vérité » (Craig, 2006, p. 62). Cela répond à un enjeu métier de journaliste.
En outre, Marie Vanoost souligne que « Toutefois, en se situant à mi-chemin entre le récit de fiction et le récit médiatique ‘’classique’’, le journalisme narratif se présente comme un terrain d’étude particulièrement intéressant pour faire se rencontrer et dialoguer divers outils, concepts et courants narratologiques. », ce qui revient à démontrer que les techniques narratives provenant du champ littéraire permettent de compléter la panoplie du journaliste. Envisager le dialogue de ces deux pratiques ne peut que les enrichir mutuellement.
Narrative journalism ou journalisme narratif
Cette non-fiction appelée « narrative journalism », en anglais, pour journalisme narratif s’est développé dans les années 1960 aux Etats-Unis. Parmi les plus célèbres publications, on recense Sang-froid de Truman Capote, publié en 1965 à partir d’un fait-divers.
Aujourd’hui, cette technique représente une opportunité économique du domaine de l’édition, en attestent les rayons des libraires, comme le présente un article du Nouvel Obs. « Il y a une envie du public, qui commence à se faire remarquer», estime Adrien Bosc, fondateur de la revue « Feuilleton », qui traduit de grands récits américains. La maison qu’il a créée, les Editions du sous-sol, rachetée par le Seuil, a opté pour ce créneau. « Nous ne sommes pas les premiers, précise-t-il. Tristram, Christian Bourgois ou d’autres ont fait le travail. »
L’écriture narrative au service de l’art et de l’entreprise
La narration remplit diverses fonctions et peut ainsi remplir des missions d’apparence contradictoire. Nous rapprochons facilement le terme de sa fonction divertissante visant à créer une identification de la part du narrataire et engager un intérêt généré par le suspense. La narration remplit également une fonction rhétorique et s’inscrit dans une démarche argumentaire destinée à convaincre. Il s’agit de la partie que la rhétorique désigne comme l’exorde. Elle est utilisée pour dresser un récit et agir sur l’émotion du destinataire afin de le persuader (technique également employé par les orateurs comme les politiques ou les avocats).
C’est donc logique que le marketing, la communication et le commerce aient choisi de susciter l’intérêt pour une marque ou un service en racontant des histoires. Le destinataire reçoit une émotion et mémorise mieux le message. C’est d’ailleurs également une technique qui peut faciliter l’apprentissage, défendue par la neuro-psychologie.
Le storytelling est l’une des branches narratives qui se décline dans le monde du marketing, de la communication et également du journalisme. C’est une approche condensée du récit destinée à avoir un impact émotionnel sur le lecteur. Les frontières sont donc très poreuses dans le monde de l’écrit.
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