fbpx

La poésie c'est quoi ? visuel

La poésie c’est quoi ?

Quelle question. Une question que j’ai posé à une multitude de personnes et qui ont eu ce visage, entre concentration et perplexité. La concentrexité ? Il y a de quoi rendre dubitatif lorsque l’on n’est pas un intellectuel ou un fonctionnaire dont le pouvoir est de nommer les choses. Il y a de quoi rendre perplexe, tant le monde de la poésie est vaste et indécis sur la question de ses frontières. Alors nous nagerons dans une mer incertaine pour tenter de recueillir une touche des définitions de chacun.e. Il n’y aura pas de réponse définitive seulement une recherche de ce qu’il existe.

« La poésie nous donne les jouissances indéfiniment nouvelles d’un monde éternellement vierge. » Paul Valéry

Un rythme ? Des vers ? Sons ? Oralité ? Musicalité ? Lyrique ?Des rimes ? Une forme ? Des règles ? Scansion ? Sonnet ? Ballade ? Alexandrin ? Haïku ? Verset ? Calligramme ? Des échos phoniques ? Une recherche lexicale ? Des figures de style ? Accents ? Pauses ? Poétique ? Sentiment ? Sensations ? Impressions ? Émotions ? Harmonie ? Borborygmes ? Troubadour ? Kamoulox ?

Je bote en touche. Un peu de tout ça ? Histoire de mettre tout le monde d’accord.

« L’ennui est un grand générateur de poésie. » Cours de poétique, tome 1 : Le corps et l’esprit, Paul Valéry

 


D’après le Larousse : Art d’évoquer et de suggérer les sensations, les impressions, les émotions les plus vives par l’union intense des sons, des rythmes, des harmonies, en particulier par les vers.

Dans l’article qu’a rédigé Mathilde, elle nous rappelle les contours infinis de la poésie. Bon pour résumer la poésie joue sur :

  • Le sens, le son et l’image mentale.
  • La forme (typographie, graphisme et arts visuels).

Cet article rappelle les « règles » de la poésie, une constellation de poète.sse.s, l’interactivité que la poésie entretient avec les autres arts (arts-plastiques, théâtre, performance, musique, danse…), les différents mouvements poétiques en France et à travers le monde ! Un article riche qui ne vous donnera probablement pas envie de lire celui-ci.


Mais revenons à nos moutons, soyons d’accord pour être en désaccord et dire que la définition de genres poétiques a toujours été débattue sur des critères formels et/ou des critères informels. Précisons que la poésie moderne / contemporaine a fait éclater tous les codes et toutes les règles qu’avait imposé le genre (la poésie épique, lyrique, dramatique…). Elle est devenue, à l’image de la citation de Paul Valery, un moyen d’expression libre, totalisant, en perpétuelle expansion, sans fin… Pas de réponse définitive. La définition de la poésie a varié selon les époques, les cultures. La difficulté de la définir et de la catégoriser s’est affermie au fil du temps. La poésie, est-elle insaisissable ? Seule certitude c’est qu’on dit d’elle que c’est une forme d’expression.

La poésie c'est quoi ? visuel 2

Mathilde :

« Pour moi, c’est vraiment une exploration de la langue qui produit tout ce que la bouche peut produire : bave, crachat, rot, claquement, mots, pensées, logorrhée, vomissements, songes, images, mots qui s’entrechoquent, souffle, borborygmes, onomatopées, silences, aigus, graves… tout ce qui sort de la bouche. »

Sébastien :
« Tu remarqueras que je prends les pincettes du conditionnel quand même, méfions-nous des discours trop péremptoires), en tout cas, à l’échelle de nos intérêts en ateliers d’écriture :
La bonne poésie fait au minimum l’effort d’interpeller le langage. Elle n’ignore pas la réciprocité de pouvoir qu’il et elle entretiennent. La poésie s’empare de la langue avec une conscience supérieure qui lui permet de résister à certaines formes de soumissions. On pourrait peut-être lui opposer la langue opérationnelle du management ou du droit, par exemple, qui sont davantage des outils dotés d’un objectif de réalisation, de performance. D’ailleurs, c’est cette matière textuelle que Reznikoff poétise.
La langue, grâce à la poésie, se tourne vers elle-même et se contorsionne, offrant des figures inhabituelles.
La « mauvaise » poésie (toujours à mon avis) ne fait pas cet effort et finalement reproduit une autorité de la langue sans la critiquer. Il s’agit par exemple de celle qui emprunte sans distance les « formules poétiques ». Celle qui veut émouvoir à peu de frais en ayant recours aux images surannées. Je crois que celle-ci trahit (mais la plupart du temps, c’est ignoré par son auteurice qui croit bien faire) la puissance de la poésie ou la soumettant à un héritage culturalisé et pour tout dire, souvent parfaitement inoffensif au final, voire insignifiant. La poésie incarne quelque chose d’éminemment révolutionnaire, dans la mesure où elle permet des changements brusques, au moins expérimentaux, dans les structures du langage. Elle est l’objet, le médium et parfois même le sujet, mais elle doit se débattre avec cette condition pour ne pas finir en texte autoréférentiel et autosatisfait. Il faut que dans sa lutte avec et contre elle-même, la poésie produise des accidents, ces accidents sont une fertilité du langage et permettent de déplacer notre esprit référentiel, voire de lui offrir d’autres paradigmes. »
Le nouveau magasin d’écriture, Hubert Haddad :

« Quel témoignage assez entier demeure-t-il de la Grèce ancienne? Homère nous contemple mieux qu’aucune pyramide. Méthode de déconditionnement, l’écriture automatique essaime à l’occasion un souffle de Sibylle. André Breton le premier aura pris au mot Lautréamont (« La poésie doit être faite par tous, non par un »). L’écriture automatique, inspirée des activités spontanées des médiums, est une technique universelle et le contraire d’une contrainte.
Il s’agit de mettre l’inconscient à participation.
Sans cette vertu importune du poème, la langue serait plane et le monde sans profondeur. La poésie est l’avènement de la réalité comme telle : la symbolisation (le langage humain) a permis par la désignation l’identification et, conséquemment, la conscience de l’absence et le doute sur l’identité. Il n’y aurait pas de réalité plénière sans cette mise à distance du symbole, en soi poétique (poïen: fabriquer). La poésie, l’événement magique qui donne à l’imprévisible le caractère de la nécessité.
La plus simple définition qui pourrait tenir compte du fait poétique : ce qui, dans le langage, piège le mystère de la séduction entre être et pensée, quand advient cet indicible tremblement du sens (est-ce assez clair ?).
La poésie n’est pas (seulement) le chant, ni le rythme, ni l’image, ni le «style», ni le sentiment attaché aux mots, ni même l’espèce de synthèse ouverte que la langue retient de tout cela dans ce que l’écriture charrie quelquefois, par manière de grâce insoumise.
La poésie comme seul témoignage du réel de l’homme, compte tenu de sa part spectrale envahissante et du socle de présence dissimulé (étrange statue que cette brume sur un piédestal de marbre).
Mais nulle parole ou singerie, fût-elle scientifique ou philosophique, n’est capable un seul instant de faire l’aveu de l’être dans sa plus intime solitude.
L’être : la conscience émiettée qu’une émotion rassemble, parfois, dans cette disparition suspendue des mots où je me rappelle soudain au monde, l’instant d’une perte de conscience — brûlante distraction ! »

La poésie c'est quoi ? visuel 3

Charles Trénet, 1966 :
« Je crois que la poésie ce sont des rêves de bonne qualité.
C’est l’art de rêver et de faire rêver.
Dans le fond la poésie est un fluide qui ne s’échange qu’entre poètes, mais tout le monde est poète. »

Léopold Sédar Senghor, 1983 :
« Les Peuls du Sénégal définissent la poésie  » des paroles plaisantes au cœur et à l’oreille. »
En Afrique, la poésie est l’art le plus complet. C’est le langage le plus expressif qui passe par les sens pour aller jusqu’à l’âme. »

André Chedid, 1979 :
« Pour moi la poésie n’est pas quelque chose de coupé de la vie donc pour moi c’est la pleine réalité enfin c’est la réalité qui comprend l’existence et cette essence de vie qui frémit au fond de nous. »

Michel Butor, 1997 :
« Évidemment les poètes, ce sont des qui gens qui travaillent sur les mots et qui les maintiennent en vie alors que les mots dans la vie quotidienne dans la conversation quotidienne s’endorment, se sclérosent. »

Pierre Seghers, 1969 :
« La poésie c’est quelque chose que l’on a sur le cœur. Je crois qu’un poème est une œuvre d’art et il n’y a pas d’œuvre d’art sans nécessité de connaissance réelle d’un langage, c’est une matière, un langage. J’aime aussi une certaine musique, un mouvement, une respiration dans le vers, dans le langage. »

MC Solaar, 1992 :
« Les salauds salissent Solaar cela me lasse, mais laisse laisse salir Solaar sur ce salut. »

Nathalie Sarraute, 1995 :
« Le propre de la poésie s’attache à rendre une sensation. »

Grand Corps Malade, 2015 :
« Pour moi la poésie c’est peut-être le fait de nous décrire, de décrire notre vie, notre quotidien, mais comme si on le décalait un petit peu en le mettant en mots, avec un ordre de mots qui change ce qu’on fait d’habitude. On essaye de rendre jolies des choses qui pourtant qui nous sont très proches et très communes. »

Hervé Bazin, 1972 :
« La poésie m’est nécessaire. C’est ma zone de gratuité, c’est ma zone de pleine liberté. Le roman vous impose un compte-rendu, vous enferme dans le réel et dans l’extérieur alors que la poésie ce n’est pas un ramassage autour de vous, c’est un ramassage intérieur, c’est une découverte constante. »

Emmanuelle Riva, 1978 :
« Chacun a sa manière d’exprimer la poésie. Mais je crois que dans tout poème, dans tout poète, il y a un volontariat, un engagement furieusement de la vérité. Et dans un poème vous pouvez dire toutes les vérités, toute la vérité. »

Jean Cocteau, 1960 :
« Eh bien c’est le mariage du conscient et de l’inconscient et de ces noces terribles et bizarres naissent des monstres qui sont les œuvres, monstres quelquefois exquis. »

Roger Vrigny, 1973 ;
« La poésie c’est la création de langage, créez du langage, vous serez poète, un point c’est tout. »

Extrait de  » La poésie c’est quoi » sur France culture.

Inconnus :

« C’est une manière de vulgariser comme la culture, l’éducation. Tout est poésie. L’Adjectif poétique est différent de la poésie. On peut qualifier un texte de poétique sans considérer qu’il est un poème. »

« Une émotion qui née dans une interaction avec un texte. Un mode d’expression qui procure des sensations. »

« Un objet diffus et informe que je ne comprends pas. Un objet de curiosité que je tente d’appréhender. »


La poésie c'est quoi ? visuel 4
« Un poème est une ville remplie de rues et d’égouts
remplie de saints, de héros, de mendiants, de fous,
remplie de banalité et de bibine,
remplie de pluie et de tonnerre
et de périodes de sécheresse, un poème est une ville en guerre,
un poème est une ville demandant à une horloge pourquoi,
un poème est une ville en feu,
un poème est une ville dans de sales draps
ses boutiques de barbier remplies d’ivrognes cyniques,
un poème est une ville où Dieu chevauche nu
à travers les rues comme Lady Godiva,
où les chiens aboient la nuit et chassent le drapeau ;
un poème est une ville de poètes,
la plupart d’entre eux interchangeables,
envieux et amers…
un poème est cette ville maintenant
à 80 kilomètres de nulle part,
à 9h09 du matin,
le goût de l’alcool et des cigarettes,
pas de police, pas de maîtresses, marchant dans les rues,
ce poème, cette ville, fermant ses portes,
barricadée, presque vide,
mélancolique sans larmes, vieillissante sans pitié,
les montagnes rocheuses,
l’océan comme une flamme lavande,
un lune dénuée de grandeur,
une petite musique venue de fenêtres brisée…
un poème est une ville, un poème est une nation,
un poème est le monde…
et maintenant je colle ça sous verre
pour que l’éditeur fou l’examine de près,
et la nuit est ailleurs
et les dames grises indistinctes font la queue,
les chiens suivent les chiens vers l’estuaire,
les trompettes font pousser les gibets
tandis que de petits hommes enragent contre des choses
qu’ils n’arrivent pas à faire »
Issu du recueil de poèmes : Les jours s’en vont comme des chevaux sauvages dans les collines, Charles Bukowski
« Ma langue est poétique, est naturelle, est sonore, est bruitée, est féconde, est douce, est inondée de soleil, ma langue a des sons d’herbes et d’été, les herbes sont sonores, l’été est sonore d’herbes, l’herbe bruit dans ma langue, l’herbe sèche de l’été, en été, l’herbe sèche est bruyante, bruisse et cingle, ce sont les herbes, les bruits viennent de l’herbe, ce sont des bruits d’herbes sèches, ma langue a les bruits sonores des herbes desséchées de l’été, les bruits répétitifs, incessants, les bruits de ma langue ne cessent pas, cinglent et se répètent, et se dessèchent au soleil, le soleil sèche les herbes, les herbes bruissent, sifflent et cinglent, ma langue sèche, siffle, cingle, ma langue sonore, ma langue herbeuse, ma langue de sons herbeux, ma langue d’herbes qui sèchent, qui sont sonores, sonne, musicale, ensoleillée, sèche, ma langue est poétique, est sèche, crépite tout l’après-midi, depuis le lever de soleil, tout l’après-midi de cet été. »

Issu du recueil de poèmes : Écrits poétiques, Christophe Tarkos


Comment écrire de la poésie ?

Les évènements culturels :

Printemps des poètes

La maison de la poésie

Poésie.io

Les ateliers poésie de Rémanence


▶ Retrouvez d’autres articles de conseils ici
▶ Rémanence des mots est un organisme de formation et propose des ateliers d’écriture


Laisser un commentaire

En savoir plus sur Blog littéraire

Abonnez-vous pour poursuivre la lecture et avoir accès à l’ensemble des archives.

Continue reading